À quand une banque humaine et digitale tenant réellement compte des besoins des utilisateurs, tout en tirant parti du meilleur de la technologie. L’on nous promet l’intelligence artificielle depuis de nombreuses années, voir des décennies, mais c’est actuellement la première fois qu’il semble possible de développer une intelligence artificielle, qui soit capable de communiquer correctement avec l’homme. Dans cette optique les banques traditionnelles sont nombreuses à promettre d’offrir en même temps le meilleur de la relation digitale et humaine, notamment à travers les PFM les assistants financiers personnels.
Il est difficile pourtant de ne pas voir que cette promesse n’est pas totalement tenue. Les mérites vantés déçoivent souvent à l’utilisation, dévoilant des formules purement de communication se cachant derrière les mots de banque humaine et digitale ou encore la mise en place de stratégies souvent ambiguës. L’exploration de modèles de banque humaine et digitale potentiels démontre que les nouveaux entrants de la FinTech n’entendent pas faiblir sur leur redéfinition des usages bancaires. Après avoir créé de nouveaux standards de l’expérience utilisateur, leur prochaine bataille sur l’intrication humaine et digitale sera passionnante ! On verra donc peut-être sous peu, si l’incursion de l’intelligence artificielle dans le monde la banque n’est qu’une marotte de plus ou s’il est là pour durer…
La majorité des Fintechs visent une intégration maximum de la technologie, tout en limitant l’intervention humaine. Pour autant, certaines banques rencontrent un réel succès en offrant une trame de la manière dont cette banque humaine et digitale peut être concrétisée au bénéfice des utilisateurs. En effet, l’américaine Umpqua Bank montre la voie avec sa dernière initiative vers une banque humaine et digitale.
Umpqua Bank, explore la notion de banque humaine et digitale
Une expérience menée auprès de 1700 volontaires via une application mobile baptisée BFF (pour « Best Financial Friend », jouant sur l’expression usuelle « Best Friend Forever »). L’utilisateur grâce à cette application peut choisir son conseiller bancaire humain préféré, parmi les différents profils qui lui sont proposés. Une fonctionnalité qui rappelle « Like ton Banquier » mise en place par la banque Crédit Agricole, dans certaines agences du Centre Est de la France. L’utilisateur passera alors par une application bancaire sur son smartphone pour communiquer avec cet interlocuteur privilégié. Son conseiller financier amical pourra donc être joint par téléphone, visioconférence ou tchat, pour toutes les questions ayant trait à ses finances.
Les premiers retours obtenus par la banque américaine Umpqua Bank sur son test grandeur nature BFF sont très positifs, et révèlent des comportements de ses clients surprenants. Par exemple, idée reçue selon laquelle les utilisateurs préféreraient sans doute la vidéo en tant que canal de communication est que leur conseiller s’est avéré totalement fausse. En effet, 99 % des contacts entre le client et son conseiller ont été effectué via texto. L’opération a été un véritable succès avec une demande bien plus forte que prévu.
Comment établir une relation de confiance numérique ?
L’autre enseignement de l’opération Best Friend Forever, détruisant le mythe selon lequel il est difficile d’établir une relation de confiance à travers les outils numériques. Cette assertion a été totalement réfutée par l’enquête, puisque les clients n’hésitent pas à transmettre des informations sensibles à leur conseiller. Dans la même veine, il semblerait que la possibilité de pouvoir échanger avec personne en chair et en os, qui plus est à leur écoute, a une valeur inestimable pour les utilisateurs.
À l’opposé de l’école de pensée estimant que la déshumanisation en cours du secteur bancaire, avec l’arrivée des assistants virtuels constitue la prochaine étape. Si dans ce test pour mieux cerner les contours d’une banque humaine et digitale, la place de l’humain est un motif de satisfaction pour les utilisateurs, aucun d’entre eux n’a émis le souhait de rencontrer physiquement son Best Friend Forever.
La démarche apparemment simplissime du concepteur de banque humaine et digitale prônée par Umpqua Bank est en réalité articulée autour de la personnalisation de la relation. C’est en effet, la philosophie de cette banque, qui prend toujours un grand soin quant à la qualité de service qu’elle délivre à ses clients. Pour autant, les Best Friend Forever utilisent toute la puissance des algorithmes d’analyse pour faire du datamining sur les quantités phénoménales de données qu’elles collectent. Ces algorithmes aident les conseillers à synthétiser l’historique des échanges passés, ce qui leur permet d’engager des conversations de façon pertinente et souvent fructueuse.
Réussir l’intrication homme machine dans la banque 2.0
Dans le modèle de banque humaine et digitale, les technologies ne sont en général jamais très loin. Elles sont aussi mises à contribution pour gérer l’emploi du temps des conseillers, puisque ceux-ci désormais exercent leur métier aussi bien dans une application mobile, que dans une agence physique dans laquelle il continue de recevoir des clients, ou traite des opérations courantes. Le système développé par la banque américaine affecte une priorité à chaque message, les messages urgents notamment lors d’un incident sont signalés automatiquement, tandis que les autres dont la réponse peut attendre une heure ou 2 sont classés dans une file d’attente.
Cet exemple démontre que l’idée d’une banque humaine et digitale peut avoir un succès, à condition d’utiliser la technologie là où elle est la plus efficace. Malheureusement, de nombreuses banques et même FinTech semblent penser qu’en mettant des outils numériques dans les mains de certains clients et collaborateurs, la banque humaine et digitale se dessinera comme par magie. Umpqua Bank avec son degré d’intrication entre l’homme et la machine réussit à préserver un équilibre fragile pour fournir à chacun un moyen de communication moderne, tout en réussissant la prouesse d’offrir à chacun une relation personnalisée en aidant le conseiller à avoir une meilleure connaissance de ses clients.
Les entraves du modèle économique des néo-banques
Cet exemple réussi d’intégration entre l’humain et la technologie reste malgré tout l’arbre qui cache la forêt. En effet, les établissements bancaires traditionnels insistent de façon complaisante sur la fragilité des modèles économiques développés par les néo banques, en moquant le concept de produits standards gratuits ou à coût minimal. Pour ne pas dire leur complaisance envers elle estimant que la plupart des start-ups n’ont tout simplement aucun modèle économique, ce qui leur permet d’évacuer la menace.
S’il y a évidemment une part de vérité dans le discours des banques, avec de nombreuses FinTech qui ne survivront pas quelques mois. Doucement et sûrement les choses évoluent, notamment au Royaume-Uni où les idées innovantes ne manquent pas pour redéfinir notre rapport à l’argent, ou inventer des solutions à de nouveaux usages. Pour cela, les FinTech britanniques commencent désormais à construire de nouveaux modèles, beaucoup plus profitable à long terme. Pour autant dans cette quête de profitabilité, il est hors de questions de remettre en question l’avantage concurrentiel établi. Car comme évoqué précédemment, les FinTech s’attaquent au marché de la désintermédiation, et pour être compétitif, l’intervention humaine doit être minimum. C’est le règne de l’automatisation, des algorithmes indispensables aux logiciels d’intelligence artificielle.
Dès lors, la facturation des services par les néo banques se fait par d’autres moyens, une voie qu’a adoptée la start-up Monzo, ou encore la licorne Starling Bank. En effet, ces 2 Fintechs ont opté pour la plate-forme de type open banking, qui permet d’ouvrir les portes de la banque via son application à des partenaires. En intégrant tous leurs services sur une plate-forme, qui leur permettent d’acquérir une visibilité incomparable, puisque ceux-ci sont intégrés dans des outils que les clients utilisent quotidiennement.
Pourquoi les banques ont tant de peine à innover ?
Le problème de l’innovation dans le secteur financier n’est pas nouveau, comme en atteste le rapport de l’EFMA sur l’état de l’innovation dans la banque. Année après année, celui-ci livre toujours le même constat, le secteur a une vision extrêmement limitée voire dangereuse sur l’ampleur des transformations auxquels elle devra faire face à moyen terme. L’exemple de la banque américaine Umpqua Bank reste une exception à la lumière de l’étude menée auprès des représentants d’institutions financières de différentes tailles et disséminées dans le monde entier. Seul 50 % des grandes banques ont une stratégie d’innovation formellement définie, malgré le buzz entourant la transformation digitale et l’avènement de nouveaux usages bancaires. Le nombre d’acteurs persistants à considérer que les changements du monde ne requièrent aucune attention de leur part est tout simplement effrayant.
Si l’on creuse un peu plus dans ce rapport, alors celui-ci révèle que cet immobilisme et cette inconscience, face aux changements drastiques qui traversent tout le secteur financier, est partagé par 31 % des acteurs interrogés. Ceux-ci pensent qu’ils obtiendront des résultats de leur transformation digitale ou de leur stratégie d’innovation dans une échéance inférieure à un an, ils sont 54 % à penser qu’ils récolteront les fruits de leurs démarches numériques dans une période de un à 3 ans. Des chiffres choquants qui reflètent un manque d’ambition flagrant et consternant, car une transformation digitale en profondeur ne peut pas produire des faits en si peu de temps, sauf à considérer qu’il s’agissait d’une transformation cosmétiques ne remettant pas en cause le cœur des modèles établis.
Dans cette quête de la banque digitale et humaine, les établissements bancaires essayant d’imaginer ce que deviendront les services financiers dans 5 ou 10 ans, afin d’établir un plan stratégique susceptible de leur permettre de réaliser leur vision ne sont pas légions. Une réalité que confirme la majorité des études sur l’état actuel de l’informatique dans les institutions financières, les grands intégrateurs et autres cabinets de conseil. Ce ne sont pas des éditeurs de logiciels et seules quelques-unes réussiront probablement cette transformation à moyen terme.
La route vers la banque humaine et digitale sera longue
Comme le montre l’exemple de la banque américaine qui a su inventer une intégration réussie entre banque humaine et digitale. Pour de nombreux acteurs, les handicaps sont de nature culturelle, mais aussi méthodologique, avec des approches inadaptées au niveau organisationnel. Sans même parler du poids considérable de leur patrimoine historique, pour autant des exemples allant dans la bonne direction existent. Même si il reste encore du chemin à faire puisque la mutation bancaire ne peut s’inscrire que sur une longue durée. Ce qui démontre que la transition qui nous mènera à l’avènement d’une nouvelle banque technologique est bien plus qu’une chimère.
Inventer une banque humaine et digitale revient à changer une roue sur une voiture en mouvement, une tâche incroyablement difficile. Aujourd’hui et demain, plus encore la proposition de valeur des acteurs financiers résidera soit, dans l’automatisation de la production, pour celles qui veulent jouer un rôle de pure Player ou de grossiste, tandis que pour celles qui souhaitent être leaders sur le marché de la distribution, devront en passer par la mise en place d’une relation et d’une expérience client de qualité avec une imbrication intime entre humain et digital.
Cette tâche pour certains ne pourra jamais être atteinte si elle repose sur l’assemblage de solutions fournies par des éditeurs tiers. Partir dans cette direction serait le meilleur moyen de construire une offre globalement médiocre, fondée sur des composants identiques à ceux des autres d’acteurs. Pour se faire une place dans ce marché hyper concurrentiel, chaque établissement bancaire ou FinTech, ou néo banque devra conquérir et s’approprier totalement sans aucune concession les fonctions sur lesquelles ils souhaitent affermir leur savoir-faire indispensable à l’heure différenciation concurrentielle.